Sans le vouloir, la Peugeot 605 a marqué le début du déclin du haut de gamme à la française. Retour sur cette grande routière à qui il n’a manqué qu’une seule chose pour réussir…
Peugeot 605 : son histoire
La Peugeot 605 succède logiquement à la 604 qui a connu un succès mitigé au cours des années 70 et 80. Arrêtée en 1985, sa remplaçante n’a vu le jour qu’en 1989. Techniquement, la 605 n’est pas qu’une simple copie de son aïeul puisqu’elle est la première grande berline de Sochaux à roues avant motrices, à moteur transversal, à essieu arrière multibras et dotée d’amortisseurs pilotés !
Outre ces innovations technologiques, elle reprend de nombreuses pièces de sa cousine, la Citroën XM, comme une grande partie de son plancher, son berceau avant, ses triangles de suspension et ses freins.
Côté moteur, elle est la première à s’équiper du V6 24 soupapes PRV (Peugeot-Renault-Volvo) développant 200 chevaux (dénommé « SV 24 »), qui n’est qu’une évolution du bloc 3.0 V6 PRV de 170 ch et 12 soupapes (dénommée « SV 3.0 »), présent dans la gamme du constructeur français depuis 1975. Difficile à l’époque de faire du haut de gamme sans proposer une motorisation dotée au minimum de 6-cylindres. Un élément également indispensable pour espérer concurrencer les constructeurs allemands déjà bien établis, qui eux n’hésitaient pas à aller jusqu’à proposer de puissants V8…
Côté style, si Pininfarina a initié les grandes lignes de la berline tricolore, c’est bien Gérard Walter, le designer maison qui a apporté sa touche personnelle pour en faire une voiture élégante et pleine de prestance. Une démarche inhabituelle sur laquelle nous reviendrons un peu plus tard…
Sa ressemblance avec l’Alfa Roméo 164 reste cependant bien réelle puisque c’est Pininfarina qui est l’initiateur de ces deux modèles, et c’est lui-même qui a dessiné avec
toujours autant de réussite le coupé Peugeot 406 dont nous avons retracé la carrière il y a quelques temps. A l’intérieur, les similitudes sont également bien présentes, même si Peugeot a su ajouter quelques touches de luxe comme des coloris clairs ou des inserts en bois véritable (une option liée aux sièges électriques en cuir).

Un toucher de route Peugeot mais une fiabilité désastreuse
Une Peugeot, c’est avant tout un châssis. Et il faut bien le dire, les ingénieurs maison ont particulièrement soigné les capacités dynamiques de la 605. Malgré un poids assez élevé (1415 kg pour la version V6 200 ch), le toucher de route reste majestueux. Le train avant se montre accrocheur et l’arrière suffisamment mobile pour enchaîner les virages avec le sourire, mais sans pour autant se faire peur. Rien à voir avec les premières Peugeot 206 sorties quelques temps plus tard…
Les amortisseurs pilotés, réservés à la version haut de gamme SV, participent au plaisir procuré à son volant. Dotés de 5 capteurs (vitesse, pression sur l’accélérateur, effort au freinage, angle et vitesse de braquage des roues directrices), ils participent à assurer un excellent compromis entre confort et tenue de route. Ajoutez à cela une direction dotée d’une assistance variable réussie, en étant à la fois légère en ville et précise à rythme soutenu, et vous comprendrez que la 605 faisait partie des meilleures sur le plan dynamique. Seuls les plus exigeants pouvaient regretter un volant trop grand et une position de conduite un peu trop haute. Si seulement ses défauts s’étaient arrêtés à ça…
Le V6 PRV, amélioré au fil des années, développe 170 ch dans sa proposition la moins puissante. Pas de quoi grimper aux arbres même si l’exercice du 0 à 100 km/h est réalisé en 8.9 s, le 1000 m départ arrêté en tout juste moins de 30 secondes (un critère presque indispensable à cette époque pour juger de la nervosité d’une auto) et la vitesse de pointe atteint les 222 km/h tout de même (un autre critère de poids…). Le principal atout de ce bloc se situe ailleurs : la souplesse.
Au final, la version V6 de 200 ch ne permet de gagner qu’une demi-seconde dans l’exercice du 0 à 100 km/h et environ 10 km/h en vitesse de pointe. La souplesse de fonctionnement et les reprises affichent un petit mieux grâce à un couple de 260 Nm (au lieu de 240 Nm) obtenu à 3 600 tours/min (au lieu de 4 600 tours/min). Petit grief : difficile pour ces deux moteurs de passer sous la barre des 10 L/100 km…

A la lecture de ses nombreuses qualités, on peut se demander pourquoi seulement 254 000 exemplaires (soit à peine plus de la moitié de l’objectif fixé initialement à 500 000 exemplaires) ont été vendus au cours de sa longue carrière (près de 10 ans de fin 1989 à juin 1999). La raison est simple : les nombreux soucis de jeunesse. Lancée trop tôt, sans avoir eu le temps de subir les tests habituels, la 605 a donné des sueurs froides à ses premiers propriétaires, lesquels ont dû essuyer les plâtres. La responsabilité de ce désastre commercial ne provient pas de Peugeot à 100 %.
L’explication est bien plus complexe : des clichés de l’Alfa Roméo 164 ont fuité quelques temps avant sa présentation officielle en 1987 et les responsables de Peugeot ont été surpris de constater l’énorme ressemblance qu’il y avait entre l’italienne et la française. Difficile alors pour Peugeot de commercialiser un modèle dont le lancement était prévu initialement en 1990 soit près de 3 ans après l’Alfa 164… D’où l’intervention in extremis de Gérard Walter pour tenter de donner une identité propre à son modèle et un lancement raccourci d’un an.
Les points à surveiller avant l’achat
De 1989 à 1992, la lionne a connu de nombreux problèmes. Si la carrosserie et la mécanique résistent plutôt bien, tout ce qui touche à l’électronique et l’électrique doit être scrupuleusement vérifiés. Les anomalies sont ainsi nombreuses et concernent de nombreuses pièces et équipements : gestion électronique de l’allumage, pompe à injection, sondes et capteurs, ABS, climatisation, centralisation, antidémarrage, instrumentation, assistance de direction, suspensions pilotées, etc… Si vous étiez fan des Guignols de l’info, émission diffusée sur Canal +, vous vous souvenez sûrement de la marionnette de Jacques Calvet, alors PDG du groupe PSA (Peugeot-Citroën), qui « disait » régulièrement que la Peugeot 605 faisait partie des voitures les moins polluantes puisqu’elle ne roulait que derrière une dépanneuse !
Quelques conseils avant l’achat : testez le véhicule convoité dans toutes les circonstances, vérifiez qu’aucun témoin n’est allumé sur le tableau de bord, assurez-vous que tous les équipements fonctionnent correctement.
Côté motorisations, les blocs essence et diesels sont globalement fiables et endurants. Attention cependant au V6 PRV qui a connu plusieurs soucis de surchauffe. En revanche, le bloc V6 SV 24 « ES9 » (2946 cm3 et 194 ch) qui a remplacé ce PRV à compter de 1998, fait preuve d’une très bonne fiabilité.
A l’intérieur, le temps a pu faire son œuvre. Tout dépend du niveau d’entretien réalisé par les précédents propriétaires. D’une manière générale, la 605 vieillit moins bien qu’une Mercedes de la même époque…

Quel prix en occasion ?
Difficile d’établir une cote précise, tant les échanges deviennent rares. Disons qu’en moyenne, une Peugeot 605 équipée de l’une des 3 propositions V6 se négocie à un tarif d’environ 5 000 €. Mais compte tenu du très faible nombre de Peugeot 605 encore en circulation et en bon état, il n’est pas impossible de trouver des petites annonces à des prix un peu plus élevés.
Sachez que l’on trouve quelques annonces avec des motorisations moins puissantes, essence mais surtout diesel. Les tarifs sont généralement inférieurs mais les kilométrages souvent élevés…
En conclusion
Si la Peugeot 605 V6 fait partie des meilleures routières des années 90 et est certainement encore capable aujourd’hui de tenir la dragée haute à pas mal de voitures contemporaines, elle est devenue extrêmement rare sur le marché de l’occasion. Si vous parvenez à dénicher un exemplaire à bon état et qui plus est équipé d’un V6, sautez sur l’occasion, elle ne se représentera certainement pas deux fois !







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